Le goût immodéré des Gaulois pour le vin est souligné par de nombreux témoignages grecs et romains. On le boit en respectant les rites indigènes, à la manière de la bière en utilisant parfois des récipients particuliers pour sa préparation, comme les seaux en bois d’if. Consommé pur, il intervient dans les sacrifices. La manière de boire des Gaulois n’a plus à voir avec le symposium grec. Aux IIe et Ier siècles avant notre ère, la Gaule est le principal marché du vin romain en Occident : il est importé par milliers d’hectolitres, sur des navires retrouvés par centaine au large des côtes de Provence, mais son commerce est sévèrement contrôlé par les chefs gaulois. Dans l’Antiquité, le vin entretient toutes sortes de lien avec le monde de la mort. En Gaule, comme en Egypte, en Grèce, à Rome, des amphores sont souvent déposées auprès du mort, avec des services à boire et des aliments divers, destinés à assurer sa survie dans l’au-delà. Consommé lors de cérémonies funéraires ou utilisé pour laver les cendres recueillies sur le bûcher, le vin accompagne les âmes défuntes et leur facilite le passage dans l’autre monde. Il est enfin un moyen de communiquer avec les ancêtres, en accomplissant une libation sur leur tombe. En Gaule, le vin n’apparaît que vers 600 avant J.-C., date à laquelle les Grecs fondent la colonie de Marseille et plantent du vignoble dans l’arrière pays. Ce vin est commercé en faibles quantités, dans des amphores dont les tessons parsèment le long du cours du Rhône et de la Saône. Il est accaparé par les  » princes  » gaulois, qui s’efforcent d’adapter les rites du symposium grec aux coutumes locales. Rare et exotique, le vin est un breuvage que l’on se doit de boire aux yeux de tous dans une luxueuse vaisselle importée (vases en bronze fabriqués en Italie, céramiques à figures rouges et noires provenant de Grèce). Mais il est également emporté dans sa tombe, à l’instar de la princesse de Vix qui se fit accompagner pour son dernier voyage par le plus extraordinaire cratère en bronze fabriqué par des artisans grecs. A la différence des vases grecs, la vaisselle à boire utilisée par les aristocrates celtes ne comporte pas d’images figurées. Le vin et ses effets sont évoqués d’une façon plus symbolique : les artisans gaulois imitent, puis détournent les décors observés sur la vaisselle méditerranéenne. Sur les vases en or, en bronze ou en terre cuite, les motifs de la palmette et du rinceau sont démultipliés à l’infini, telle la vigne de Dionysos. Satyres, ménades et autres représentations narratives sont remplacés par des figurations ambiguës, créatures contorsionnées, à moitié imaginaires, semblant accomplir des danses frénétiques et reflétant les croyances celtiques. Ces motifs témoignent d’un rapport particulier à la boisson et à l’ivresse qu’elle procure, tendant vers un but précis : la transe qui rapproche l’homme des divinités à travers la consommation et la libation du vin. En Gaule comme en Grèce, le vin occupe une place importante dans la vie religieuse. Les sanctuaires gaulois livrent des milliers d’amphores, consommées dans le cadre des rituels. Les libations accomplies par les prêtres obéissent aux mêmes principes que dans le monde méditerranéen : dédiées aux divinités souterraines, les amphores sont déversées sur le sol ou précipitées dans des cavités creusées après avoir été  » sabrées « . Entre Toulouse et Agen, des centaines de puits ont reçu sur leur fond des dépôts intentionnels d’objets plus ou moins riches contenant des amphores, de la vaisselle, des objets liés à la vie militaire. Il pouvait s’agir de puits funéraires ou de puits à offrandes, espace de communication entre le monde des vivants et celui des morts. Ce furent sans doute les Grecs de Marseille qui implantèrent le premier vignoble en terre gauloise, au début du VIe siècle av. J.-C. Après avoir fait l’objet d’un commerce florissant pendant plusieurs siècles, ce vin subit la concurrence du vin de l’Italie romaine à partir du IIIe siècle av. J.-C. Aux IIe et Ier siècles av.J.-C., la Gaule est le principal débouché du vin romain. Véritable  » Eldorado « , la Gaule céda à Rome de l’or et de l’argent en quantités immenses pour satisfaire sa soif. Les gaulois ne commencèrent en effet à produire du vin en abondance qu’après la conquête romaine de 52 av. J.-C. En témoignent des installations viticoles nombreuses, réparties aux quatre coins du territoire ainsi que de multiples ateliers de fabrication d’amphores. C’est donc aux premiers siècles de notre ère qu’il faut faire remonter l’origine de nos grands vignobles.